Je profite d’un court séjour en Corée pour aller m’entraîner dans les montagnes de Séoul : Dobongsan est un bon compromis vu le temps qui m’est imparti.

J’y suis souvent allé : en hiver, et aussi en été lorsque j’avais réalisé la traversée intégrale des parcs Dobongsan et Bukhansan.

Là je monte directement sur la crête de Dobongsan, sans trop prendre le temps de sortir mon appareil photo, et je me retrouve assez vite parmi les rochers polis par le vent et la pluie.

Le chemin n’est pas toujours très facile, et n’en a que le nom car il faut souvent enjamber des roches, des racines, voire escalader des pans de muraille.

Puis les premiers vestiges apparaissent. Cette fois, il ne s’agit pas des restes d’une ancienne civilisation khmer, des ruines de sanctuaires antiques ou de temples chinois d’il y a 2000 ans, non ce sont tout simplement les bunkers oubliés de la guerre de Corée.

Pour ceux qui ne s’en rappellent pas, la guerre de Corée opposa le nord et le sud du pays au début des années 50.

La Corée était déjà occupée par le Japon depuis 1910, son ennemi de toujours,  et lorsqu’en 1945 celui-ci perdit la guerre, les Etats-Unis et l’Union Soviétique se partagèrent le territoire coréen. Le Sud devint pro-américain, le Nord communiste, et les élections libres de 1948 conduisirent à la naissance de deux gouvernements et le 38ème parallèle devint une frontière politique. Comme quoi la liberté de vote peut mener à la scission d’un pays.

En juin 1950 les forces du Nord envahirent le sud. Les Sud-Coréens mal préparés furent dépassés et repoussés jusqu’au sud-est de la péninsule ! Les forces de l’ONU, menées par le général MacArthur, débarquèrent  et repoussèrent les forces nord-coréennes au-delà du 38ème parallèle, jusqu’à la frontière chinoise !

Mais la Chine entra en guerre à son tour, envoya 1, 7 millions d’hommes (!) et les troupes de l’ONU se replièrent à nouveau derrière le 38ème parallèle. Séoul fut prise par les communistes, reprise par les Américains, détruite à 70%… Les troupes onusiennes reprirent un peu de terrain perdu et trois ans et 1, 7 millions de morts après, l’armistice fut signée et la frontière retrouva exactement la même place qu’avant, au 38ème parallèle. Les Coréens laissèrent au tapis 800000 soldats, les Chinois en firent autant. L’ONU déplora 57000 morts, ce qui vous en conviendrez serait intolérable de nos jours (4500 morts américains en Irak, 2000 en Afghanistan).

Aujourd’hui la frontière est toujours là, avec sa DMZ, zone démilitarisée, ses grillages, barbelés, projecteurs, ses haut-parleurs… La Corée est un tampon entre l’Amérique et la Chine. Sans ces deux là, il y a fort à parier que la Corée du Nord et la Corée du Sud seraient redevenue Corée tout court.

Allez, faisons la trêve, et continuons notre périple sur les via ferrata coréennes (oui maman, en-deça du 38ème parallèle)…

Effectivement, ce sont plus des aides à l’ascension que des via ferrata, aucun besoin de s’équiper ; pas la peine de s’assurer. On ne peut pas courir certes, mais l’avantage c’est que ça fait du dénivelé !

Les Coréens sont friands de ces balades dans les montagnes de Séoul ; ils s’y promènent équipés comme pour le Tour des Annapurnas ! Je croise beaucoup de groupes, et la plupart sont des retraités ! Ils sont en forme, le restent le plus longtemps possible, et j’en ai vu certains qui devaient avoir plus de 70 ans qui évoluaient sur des portions assez aériennes !

Me voilà sur les crêtes de Dobongsan, le « ridge » 능선 comme ils l’appellent.

Avec ses rochers, posés là négligemment par le vent et la pluie…

Mais il est déjà temps de redescendre (et oui je n’ai pas beaucoup de temps, il ne s’agissait là que d’une petite séance d’entraînement, désolé pour les soiffards d’aventure, ceux qui aiment les rencontres avec les ours ou les serpents à sonnette)…

Je descends le long de la falaise de 오봉 (Obong Peak)

passe un petit pont suspendu,

puis j’arrive au sanctuaire de Bomun.

Petit arrêt ravito pour engouffrer un kimchi, puis je repasse la porte pour rejoindre l’effervescence de la ville.

Là, juste le temps de prendre une petite douche, et c’est reparti vers ma prochaine étape… le pays d’en face, éternel ennemi… le Japon !