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Me revoilà tout là-haut, au bord du Maïdo, à la Réunion… Objectif : rallier Cilaos par le chemin le plus court, et revenir via le tracé du Grand Raid… histoire de faire de jour une portion habituellement réalisée de nuit

Maïdo
Plongée dans le cirque de Mafate. Je ne vais pas m’y attarder, on l’a déjà fait ensemble en juin dernier.

Mafate
Parvenu à Roche Plate, je quitte le sentier de la dernière fois et prends plein sud, longeant d’une main le Mur infranchissable du Maïdo, de l’autre les canyons profonds qui zèbrent le plancher de Mafate. Direction Trois Roches.

Mafate
Mafate
Trois Roches porte bien son nom. Trois énormes rochers trônent là où le ruisseau (Rivière des Galets) disparaît dans un gouffre.

Trois Roches
Trois Roches
Puis on s’extirpe du canyon de Rivière des Galets pour se hisser sur un plateau, celui de Marla. Il me faut hâter le pas car le soleil descend sur l’horizon.

Marla
Au fond de Mafate, il fait nuit plus tôt : seuls les sommets environnants sont éclairés comme le Grand Bénare ; le fond de la cuvette est déjà dans l’ombre. Les rayons du soleil ne se courbent pas, aussi peine-t-il à m’envoyer un peu de lumière, et encore en faisant des bandes…

Marla
J’arrive à Marla, étape importante du Grand Raid. Quelques cabanes dispersées ça et là sur le plateau, pour la plupart des gîtes.

Marla
Je hâte le pas, la nuit tombe. J’entame à toute allure l’ascension du Col du Taïbit, celui qui permet de passer d’un cirque à l’autre, de celui de Mafate à celui de Cilaos.

Col du Taïbit
En haut du col, la nuit finit d’envahir l’île, même les sommets sont abandonnés par le soleil. Devant moi, les premières lumières de Cilaos s’allument. J’allume moi aussi ma frontale. Il me reste une longue longue descente dans le vallon du Bras Rouge, pour remonter sur le plateau du village de Cilaos et rejoindre mon gîte pour la nuit. Et dormir, enfin.

Col du Taïbit
Je m’endors rapidement, après un repas frugal, assommé de fatigue car je précise : je suis parti directement pour ma balade en arrivant de France ; l’avion à peine posé  j’ai ramassé mes affaires de running et entamé ma promenade sans prendre le temps de fermer  l’oeil…
Le lendemain, le soleil s’est levé un peu avant moi. Des nuées accrochées par les sommets lâchent quelques embruns sur l’église de Cilaos, histoire de s’alléger pour s’en dégager.
Cilaos
J’adore Cilaos. Et pourtant, ce ne sont pas que des bons souvenirs qui règnent ici : c’est là que j’ai abandonné l’année dernière, les pieds blessés… Du coup je quitte la ville en espérant faire de même dans deux mois… Je me retourne une dernière fois, la laissant sous son nuage : à très bientôt Cilaos !

Cilaos
Pour ceux qui ont déjà fait la Diagonale des Fous, ou ceux qui vont bientôt la faire, cette partie va être plutôt intéressante car elle est toujours parcourue de nuit (sauf peut-être pour Kilian Jornet). Là, du coup, profitez des vues, car pendant la course on passera à côté sans les voir…
Ascension du Col du Taïbit. Comme la veille au soir, mais dans l’autre sens. On distingue les Trois Salazes. Le col est à gauche, dans la brèche.

Trois Salazes
Le sentier est très agréable, serpente parmi les arbres « barbus ».

Col du Taïbit
Col du Taïbit
Allez, juste pour le plaisir. Je m’assois sur une pierre et admire la vue sur le Cirque de Cilaos. En face, au-delà du village qui aura assisté à mon abandon, le mur du Coteau Kerveguen que j’avais descendu l’année dernière sur les talons, ne pouvant poser les pieds par terre à cause des plaies qui les avaient entamés…

Cilaos
En espérant que tout cela ne reste qu’un mauvais souvenir et ne se reproduise pas cette année, je termine mon ascension. J’arrive au Col du Taïbit. Le même petit oratoire que la veille au soir.

Col du Taïbit
Je passe le col ; de l’autre côté, Marla et ses gîtes. Et son ravito de dans deux mois…

Marla
Chaque village ayant son église, Marla n’y échappe pas. Nous ne sommes pas dimanche, alors elle est fermée. J’avoue que j’aurais bien aimé y assister par curiosité.

Marla
Puis je m’éloigne de Marla par le nord est, c’est-à-dire que je quitte le sentier parcouru la veille. Nouvelle traversée de Rivière des Galets, le sentier traverse la forêt et on entame les 200m de dénivelé qui nous hissent sur un plateau.

Plaine des Tamarins
C’est la Plaine des Tamarins. Ceux-ci sont à terre pour une grande partie d’entre eux. Probablement abattus par des cyclones fréquents.

Plaine des Tamarins
Plaine des Tamarins
À partir de ce moment, la météo change. Ou plutôt, on change de météo. Car sous le flux nord ouest des nuages tenaces s’accrochent aux Salazes et recouvrent le Cirque de Salazie, laissant tomber une bruine humide sur le sentier. Mafate restera toute la journée sous le soleil, tandis que Salazie ne le verra jamais. L’hiver et l’été ne séparés que par le Piton Marmite… C’est la particularité de cette île, toute en contraste.

Plaine des Tamarins
Plaine des Tamarins
On arrive enfin, pataugeant dans la boue (souvenirs souvenirs) au Col de Fourche. C’est là que le Grand Raid a été endeuillé l’année dernière, un coureur du Marseille Trail Club ayant chuté dans le ravin en pleine nuit… J’aurais apprécié y voir une plaque, mais non. Le précipice est toujours là, anonyme, et seuls les locaux ou les traileurs savent que s’est joué ici un drame. D’ailleurs, je l’ai appris plusieurs jours après ma sortie, la Diagonale des Fous ne passera pas par le Col de Fourche, mais un peu au-dessus, par le Col des Boeufs.

Col de Fourche
Je m’arrête un court instant au bord du précipice, plein de pensées envers ce traileur disparu, et je repars vers Piton Marmite et Sentier Scout.

Sentier Scout
Là, on bifurque vers l’ouest, quittant la crête, et on repasse dans l’été de Mafate.

Sentier Scout
Sentier Scout
Même de ce côté, la vue sur Mafate est impressionnante. Le relief est saisissant, et donne la mesure de cette course hors normes.

Mafate
Derrière, le chemin parcouru…

Sentier Scout
Je ne suis encore qu’à Ilet à Bourse, il me reste encore beaucoup de chemin à parcourir : la remontée vers Grand Place, la descente infernale sur Roche Ancrée, puis Roche Plate et enfin l’ascension du Maïdo. Mafate est zébrée de montagnes, de crêtes acérées, de canyons profonds. Le tracé du Grand Raid emprunte une voie perpendiculaire à ces obstacles.

Bambous de 20cm !
Si fait que Roche Plate et le Maïdo me sont apparus vers 14 heures et ne paraissaient pas si loin (environ 4km à vol d’oiseau), sauf que n’étant pas un oiseau mais plutôt un insecte rampant ou sautillant selon ma forme, je suis obligé de monter sur chaque colline et descendre dans chaque gouffre, traversant des ruisseaux de l’eau jusqu’aux genoux. Tant et si bien que le soleil s’est couché alors que je quittais à peine Grand Place,

Grand Place
et quand je suis arrivé à Roche Plate, j’avais allumé ma frontale depuis longtemps et ce sont les étoiles qui m’ont regardé grimper le Maïdo.
J’aurais mis 14 heures pour rallier Cilaos au Maïdo. Rien que ça. Pour une distance d’environ 50km. Cette portion est très technique. Beaucoup de cailloux, beaucoup d’escaliers, ce qui rend la course très difficile. On marche dans Mafate, a fortiori la nuit…
Arrivé au Maïdo, il me restera, dans deux mois, environ 60km à parcourir… gloup.

J’aurais fait une jolie petite sortie, environ 70km et surtout 6000m de dénivelé positif. De quoi voir venir. Et surtout des images de cette île extraordinaire plein les yeux.

 

mafateGRR

Never Hesitate - Never Regret

Comments:

  • Franca

    22 août 2013

    Eh bien je dois dire que ce post m’a surpris ! Parce que je me suis laissée aller par le charme de tes photos et j’ai eu l’impression qu’il s’agissait presque d’une « promenade » … Quand on sait la souffrance , la sueur, le sang et les larmes parsemés tout au,long de cette course …!

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  • Jphi

    22 août 2013

    C’est vrai, Franca. Le trail a cela de contradictoire : on souffre, et pourtant, c’est du plaisir intense. La douleur s’efface devant la jouissance et 70 bornes restent une belle balade. Qui n’a pas ressenti cela ? A l’arrivée d’une course difficile c’est « plus jamais ». Et DÈS LE LENDEMAIN c’est « je remets ça l’année prochaine ». Comme quoi la douleur du corps s’efface devant le plaisir de l’esprit… et j’ajouterais même que le cerveau ne garde que le meilleur et efface ce qui lui a déplu… Fou, non ?

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  • Romain L.

    24 août 2013

    Encore un superbe récit accompagné de photos incroyables! Merci.
    A noter que j’ai découvert pour la première fois que les cartes IGN des DOM-TOM sont dispo sur Geoportail! Bien pratique pour repérer ton parcours et mesurer les dénivelés!!!
    Te voilà bien préparer pour l’UTMB et la Diag’ ! J’espère que cette année les démons (ou serait-ce des dieux?) de la météo seront magnanimes! Amuse-toi bien!

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  • Jphi

    24 août 2013

    Merci Romain ! Je mettrai la trace GPS en téléchargement, ce sera plus pratique
    Je commence à surveiller la météo pour le we prochain…..

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  • Roxane

    25 août 2013

    Tes récits … tes photos … tu nous fait rêver J-Phi …;-)

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    • Jphi

      27 août 2013

      Tant mieux !! Ça veut dire que c’est réussi, merci !

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  • vannier

    5 mai 2015

    quel type de lampe frontale as tu utilisé pour la Diag? Une lampe frontale puissante genre Ferei ou une autre?

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  • 5 mai 2015

    La MyoXP de chez Petzl (que j’ai toujours : increvable… )

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